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droit pénal - garde à vue - réforme. mise en oeuvre. modalités

Question n°3349
Ministère interrogé : Justice et libertés

Publié au JO le 08/06/2011

RÉFORME DE LA GARDE À VUE

M. le président. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.
M. Philippe Gosselin. Ma question s'adresse à M. le garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Elle porte sur la réforme de la garde à vue, qui vient précisément d'être évoquée.
Le 1er juin, est entrée en vigueur la loi portant réforme de la garde à vue, votée le 12 avril dernier. Je rappelle que le Conseil constitutionnel avait censuré le régime actuel de garde à vue et donné au législateur jusqu'au 1er juillet pour prévoir une assistance effective de l'avocat. Nous sommes donc dans les temps, et je tenais à le souligner.
Le Parlement, dans son ensemble, a pris ses responsabilités, et le texte a été voté dans des délais très courts. Il permet de garder un équilibre entre droit de la défense et efficacité de l'enquête, dans l'intérêt de la société et des victimes, qu'il est important de ne jamais oublier.
Toutefois, dans son arrêt du 15 avril dernier, la Cour de cassation a fait valoir que l'assistance de l'avocat et le droit à garder le silence devaient entrer en vigueur immédiatement. Elle télescopait ainsi, de façon plus que particulière - c'est le moins que l'on puisse dire -, des arrêts récents, antérieurs, et surtout le vote du Parlement. La Cour s'est à nouveau prononcée, le 31 mai dernier, sur la légalité des gardes à vue antérieures au 15 avril.
Un groupe de suivi a été mis en place et a constaté, lors de sa première réunion, que les parquets et la majorité des barreaux avaient su s'adapter avec efficacité à cette entrée en vigueur précipitée. Sans doute y a-t-il encore quelques ajustements à faire, sans doute y a-t-il des différences entre les grandes agglomérations et les régions, et peut-être faut-il ici rassurer l'ensemble des acteurs, notamment parce que Mme Reding et la Commission européenne veulent faire de nouvelles propositions.
Ma question sera double. Alors que notre loi est désormais effective, pouvez-vous, monsieur le garde des sceaux, nous présenter un premier bilan de l'entrée en vigueur anticipée ? Par ailleurs, pouvez-vous nous éclairer sur les conséquences de l'arrêt de la Cour de cassation de mardi dernier quant aux procédures commencées avant l'entrée en vigueur de la loi ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)
M. le président. La parole est à M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés.
M. Michel Mercier, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés. Comme vous l'avez rappelé à juste titre, monsieur Gosselin, le Parlement a voté, le 12 avril dernier, une loi réformant la garde à vue, à la demande du Conseil constitutionnel, et a respecté un principe fondamental qui est celui de l'équilibre entre deux droits, également garantis par la Constitution : celui des droits de la défense et celui de la sûreté et de l'effectivité de la recherche de la vérité et des délinquants. Ce texte équilibré a été publié au Journal officiel du 15 avril.
Le même jour, l'assemblée plénière de la Cour de cassation, au titre de son contrôle de conventionalité sur la Convention européenne des droits de l'homme de 1950, a déclaré d'application immédiate deux règles : la présence d'un avocat et la notification du droit de garder le silence pour la personne gardée à vue.
Grâce au grand professionnalisme des services de gendarmerie et de police, des magistrats, de l'ensemble des auxiliaires de justice, les choses se sont bien passées. Il n'y a eu que peu d'incidents à la suite de ces décisions de justice.
Depuis le 1er juin, c'est la loi dans sa totalité qui s'applique. Il est trop tôt pour faire un premier bilan. À ce jour, 37 % des personnes gardées à vue ont demandé l'assistance d'un avocat et les avocats ont répondu à cette demande dans 60 % des cas. Ces chiffres sont en constante augmentation.
Le 31 mai dernier, comme vous l'avez indiqué, monsieur le député, la chambre criminelle de la Cour de cassation est revenue sur sa jurisprudence antérieure et a appliqué celle de l'assemblée plénière : elle a décidé que les auditions faites sans notification au silence et sans assistance d'un avocat étaient irrégulières. Cela ne veut pas dire que toutes les procédures sont irrégulières, mais que des nullités pourront être soulevées et qu'il appartiendra à toutes les juridictions d'examiner, dans chaque cas, ce qui a été produit par la garde à vue et devra être sorti de la procédure, et le reste qui pourra être conservé. C'est donc un gros travail pour les juridictions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)